L’eau est d’un beau bleu profond. Nous la traversons, nous
laissant couler jusqu’à la proue de l’Alice Robert. Nez à nez avec le canon de
proue, le regard porte plus loin que le plongeur qui parcourt le pont avant, au
moins aussi loin que la flèche du mât.
Plus haut, tout est clair. Plus bas, ce voile de gaze qui
enveloppe l’épave. Le canon de proue émerge sur ses pattes comme un insecte
monstrueux.
Nous passons au-dessus du canon bâbord avant qui retient le
filet qui drape sa tourelle presque circulaire.
Et nous laissons le mât qui a la tête dans l’azur et le pied
dans le brouillard
Le château disparaît entièrement sous la gaze de ce blanc
bleuté, ou bleu très pâle.
A l’arrière, la mitrailleuse à double canon flotte sur cette
nappe qui masque le pont en teck.
Une petite cigale a élu domicile sur l’encroûtement entre
les deux canons.
Du bateau, nous n’avons vu que le mât et une partie de la
proue. Tout le reste des structures visibles n’était qu’armement rajouté peu de
temps avant le torpillage. Aurait-il fallu lever le voile pour que tout
apparaisse dans le bleu ? Non. Un jour dégagée, un jour dans le noir, un
jour dans le brouillard laiteux, un jour propre dans le château, un jour dans
un linceul de gaze bleu pâle… Quelle chance de vivre toutes ces
ambiances !
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